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Ourdia Labadi. Conservatrice principale des forêts à Tizi Ouzou: On ne choisit pas le même type d’arbre pour un alignement en ville, en campagne ou dans un jardin public

-En plus de l’embellissement du paysage urbain, les arbres et les arbrisseaux plantés dans le milieu urbain remplissent bien d’autres fonctions. Pourriez-vous nous rappeler quelles sont ces autres fonctions ? Autrement dit, pourquoi planter des arbres en ville ?

Au-delà du ravissement ressenti dans la contemplation des arbres, de par leur majesté, leur beauté et le bien-être qu’ils procurent, ils ont aussi la faculté de rendre nos villes : plus saines ; en améliorant la qualité de l’air, en produisant de l’oxygène, mais aussi en retenant le CO2, les poussières et autres polluants chimiques qui s’y trouvent. Ils limitent l’écoulement superficiel des eaux de pluies qui causent des dommages aux infrastructures, en facilitant l’infiltration dans le sol. Ils humidifient l’air et le rafraîchissent, limitent la virulence des vents, plus agréables, car ils offrent des espaces de récréation et des espaces de sport recherchés par la population en raison du calme et de la sérénité qu’ils procurent.

Cela aussi par rapport au fait que les arbres atténuent fortement la pollution sonore. Ils diminuent par là le stress et la dépression.

Plus attractifs, ils offrent un refuge pour les oiseaux et autres animaux, ce qui rend notre environnement sensiblement plus diversifié et attractif.

-Comment évaluez-vous l’aménagement des espaces urbains en Algérie, du moins pour les villes que vous connaissez mieux ? Avons-nous réussi à bien choisir les arbres qui s’adaptent aux différents climats que compte l’Algérie ? Quelles sont d’après-vous les espèces les plus adéquates à nos villes ?

La forte urbanisation et la concentration de la population dans les villes n’a sûrement pas aidé à la promotion des espaces boisés urbains en Algérie. Pourtant, la réglementation a prévu des ratios d’espaces verts à respecter, ainsi qu’une panoplie de textes pour leur préservation et leur développement (tel que la loi 07-06 relative à la gestion, protection et développement des espaces verts dans le cadre du développement durable…).

A mon sens, la problématique réside beaucoup plus dans le financement de leur création, entretien et sauvegarde. En plus de l’acquisition d’espèces intéressantes et de taille adéquate ; les arbres en ville doivent être plantés, taillés, coupés et renouvelés si nécessaire, les jardins ou parcs doivent avoir des gardiens ou jardiniers.

En dehors des grandes villes, ces opérations ne sont pas réalisées en raison du manque de moyens financiers. Du moment qu’un arbre pousse correctement, c’est qu’il a pu s’adapter à la zone où il a été planté. Cependant, le choix de l’espèce n’est pas toujours approprié à l’environnement urbain, on ne choisit pas le même type d’arbres pour un alignement en ville, en campagne ou dans un jardin public.

En ville, pour l’alignement, l’arbre ne doit pas avoir de grandes dimensions, ne doit pas développer des branches trop basses, de préférence ne pas produire de fruits salissants, de pollen allergènes. Le choix doit être aussi esthétique, par rapport à un aspect, une couleur ou des fleurs remarquables. Dans les jardins par contre, on peut rechercher un effet de masse, des espèces à port pleureur, des arbres de grandes dimensions qui dans ce cas ne poseront pas de contraintes pour la visibilité ou pour une coupe, qui produisent des fruits, pour nourrir les oiseaux.

Pour l’alignement en ville, on peut citer le ficus rétusa (très belles formes après une taille), le stérculia, le mûrier (existe des espèces dont les fruits ne sont pas salissants), le sophora, le ginko biloba, le tilleul, l’olivier de bohême (convient aux villes de l’intérieur du pays)… Pour les jardins, le magnolia a grandes fleurs, le catalpa, le jaccaranda, l’erythrine, le faux poivrier. Pour l’alignement des grands axes routiers, le platane, le frêne, le peuplier… Les arbres connus pour être dépolluants sont le peuplier noir, le robinier faux acacia, Paulownia tomenteux.

-Les arbres plantés dans les différentes villes d’Algérie à l’époque coloniale semblent les plus résistants aux aléas du climat. Pourriez-vous nous expliquer ce qui caractérise ces arbres (un exemple d’une ville que vous connaissez de près) ?

Je ne crois pas que ce soit lié à une résistance aux aléas climatiques ; je dirai plutôt que la plantation d’espèces remarquables par certaines caractéristiques botaniques fait que cela marque les esprits à leur ue. Parmi les arbres plantés à l’époque coloniale, on peut citer le magnolia grandiflora, qui est un arbre avec de grandes feuilles persistantes et luisantes et qui donne de grandes fleurs blanches nacrées extraordinaires, un très beau spécimen.

Nous avons aussi le bellombra, arbre imposant qu’on peut admirer dans la ville de Cherchell, dont le nom dérive de bella ombra. Le catalpa avec ses larges feuilles, ses fleurs en grappe et ses longues gousses ressemblant à des haricots, il est d’ailleurs surnommé l’arbre aux haricots. L’étoile de Noël ou poinsettia, qui est une euphorbe présentant de grandes bractées de couleur écarlate en hiver et j’en passe. Ce sont des espèces qui ont été introduites pour leurs intérêts esthétiques, l’objectif a été atteint.

El Watan

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