Les rapaces qui sont classés comme étant des oiseaux anthropophiles, à l’instar des vautours moine, le milan noir, vautour percnoptère d’Egypte et surtout l’aigle et la buse, sont souvent recherchés pour le divertissement. Néanmoins, ces oiseaux récréatifs «sont des réservoirs importants de salmonelles à l’origine de pathologies humaines.
La morbidité est très élevée chez les enfants, la mortalité, aidée par la malnutrition, est fréquente», alerte Ahmed Alileche, responsable de l’animation et de vulgarisation au Parc national de Djurdjura.
Ce dernier indique «que les rapaces ont un régime alimentaire très varié»,car ils «fréquentent les abattoirs, les décharges publiques et certaines usines de produits alimentaires», précise-t-il.
Cet agronome de formation annonce qu’«une grande partie de leur nourriture est constituée des cadavres, des résidus d’abattoirs, des déchets domestiques, provenant notamment des trois grands réservoirs animaux de Salmonella». Et de prévenir : «Servant de relais entre les reptiles, les rongeurs et l’homme, ces rapaces anthropophiles sont d’actifs disséminateurs de bactéries et d’agents pathogènes variés.»
Les excréments des rapaces propagent la salmonelle
Les excréments des rapaces sont un facteur important dans la propagation des bactéries telles que la salmonelle. Les rapaces «disséminent leurs excréments partout et abondamment, ce qui facilite la transmission de leurs éventuelles infections intestinales salmonelliques aux autres espèces animales et surtout à l’homme», affirme M. Alileche, notant à cet effet qu’aucune étude n’est réalisée à ce jour en Algérie dans ce sens. Ce qui rend la prévention plus compliquée dans la mesure où «il est quasiment impossible de connaître le taux d’infection par ces rapaces ou le risque de contagion qu’ils représentent pour l’homme», constate notre interlocuteur qui déplore «le manque de moyens pour toute analyse bactériologique». «L’être humain ne doit pas prendre de risques là où il faut être plutôt prudent».
Telle est la devise de M. Alileche, qui ne cesse de prévenir des éventuels risques auxquels s’exposent ceux qui tentent de domestiquer les rapaces dont la plupart sont des oiseaux migrateurs. Ces oiseaux voyageurs qui transitent par de différents pays risquent de contracter des maladies et la transmettre aux populations des pays où ils atterrissent.
A l’heure où la planète entière est aujourd’hui bouleversée par une maladie virale ravageuse qui est le Covid-19 et tous les laboratoires du monde sont à pied d’œuvre dans l’espoir d’identifier l’origine et le vaccin efficace qui saura sauver l’humanité d’une calamité planétaire, ce conservateur divisionnaire au PND invite les citoyens à cesser «de manipuler des animaux dont on sait déjà qu’ils sont vecteurs de maladies transmissibles et à conséquences indéterminées.
Réglementation : «Il faut des mesures fermes pour protéger les animaux et veiller sur la santé publique»
Bien que des lois classant le singes magots et d’autres animaux sauvages comme étant des espèces protégées, il n’en demeure pas mois que les agressions à l’égard de ces animaux sont récurrentes. A ce propos Ahmed Alileche, conservateur principal au Parc national du Djurdjura, lance un appel aux autorités afin de veiller à la fois sur la pérennité d ces espèces sauvages et aussi la santé publique qui d’ailleurs constitue l’enjeu majeure en ces temps du chamboulement de l’ordre naturel. «Les autorités doivent prendre des mesures fermes pour, d’une part protéger ces animaux et d’autre part, veiller sur la santé publique», recommande-t-il. Ce responsable de l’animation au PND appelle la police de l’environnement à multiplier ses interventions sur le terrain pour dissuader les amateurs d’animaux apprivoisés. Comment ces mesures doivent-elles se traduire sur le terrain ? De l’avis de ce spécialiste de l’écologie, la protection de ces animaux sauvages peut-être assurée par un gardiennage strict des lieux où se rencontrent ces singes et rapaces. A cela s’ajoute «une réglementation interdisant la capture, le transport et la domestication de ces animaux conformément à la convention internationale de Washington relative au commerce international des espèces menacées de disparition (CITES)», insiste-t-il. En forêt comme en montagne, notre interlocuteur appelle à assister les gardes forestiers dans leur mission de protection face aux récalcitrants.
Sensibilisation : Le citoyen ne peut pas assurer un bio-confinement à l’animal capturé
La sensibilisation de la population à la nécessité du respect de l’environnement d’une part et aux risques sanitaires d’autre part est de mise. La communication sous diverses formes sur les enjeux des équilibres des écosystèmes qui ne peuvent que se retourner contre l’homme une fois qu’elles échappent au contrôle, demeure un volet non-négligeable. «Une bonne maîtrise des risques sanitaires commence nécessairement par une bonne information du public et des divers acteurs : les visiteurs, touristes, agents forestiers», estime Ahmed Alileche, conservateur principal au Parc national du Djurdjura. Ce responsable appelle à multiplier les campagnes d’information à travers les médias et les réseaux sociaux.
Selon lui, les docteurs vétérinaires sont mieux placés pour se charger d’une telle mission. «Ils peuvent faire passer le message aux citoyens sur les risques qu’ils encourent en élevant des singes ou rapaces chez eux», explique Alileche, considérant que l’information sur les éventuels risques environnementaux relève du droit des citoyens. D’autant plus que ces citoyens ne sont pas en mesure d’assurer le suivi sanitaire nécessaire à ces animaux capturés, lorsqu’on sait que dans les parcs zoologiques, «ce suivi reste à désirer». «Il est clair que, le détenteur d’un singe ou d’un rapace à la maison ignore complètement le statut sanitaire de l’animal et ne peut en aucun cas assurer les garanties sanitaires exigées», met en garde notre interlocuteur.
De l’avis de ce conservateur des espaces protégés, le citoyen ne peut en aucun cas assurer le bien-être des animaux capturés. Avec ces attitudes, il ne peut qu’accentuer leur souffrance. «Le citoyen doit se rendre à l’évidence que l’espace qu’il réserve au singe ou rapace capturé ne peut répondre aux besoins de l’animal », observe ce spécialiste qui souligne que «l’animal a le besoin d’exprimer un certain nombre de séquences comportementales naturelles.»
A cet effet, l’animal en capture ne peut que développer des comportements agressifs incontrôlables par son accompagnateur. Car «l’isolement individuel de l’animal stresse celui-ci et génère en lui un comportement agressif. Habitué à vivre en groupe comme c’est le cas du singe, l’animal devient insupportable. Sa captivité dans un endroit restreint est contraire au droit de l’animal dont l’éthologie doit être respectée», explique ce spécialiste. En somme, «le citoyen n’est pas en mesure d’assurer un bioconfinement digne de ce nom à l’animal capturé».
El Watan