Par la signature de l’accord préliminaire avec la partie allemande en début avril, pour la relance du projet Desertec, l’Algérie cherche-t-elle à rattraper le temps perdu dans le développement de ses énormes potentialités en énergies renouvelables ? Sans doute, quoique le retard accusé en la matière est immense. Les experts sont unanimes à affirmer que la décision est entre les mains du gouvernement. Pour ce projet et avec cet accord, d’aucuns diront que les choses ne devraient plus rester au stade où elles étaient jusqu’à présent. Elles s’accélèrent pourrait-on dire.
Les deux parties comptent signer un premier accord technique à distance au cours des prochaines semaines, qui sera consacré à l’étude des qualifications de l’Algérie en énergie solaire et l’échange des formations spécifiques sur le terrain. Le ministre de l’énergie, Mohamed Arkab, a indiqué que s’il n’y avait pas eu la pandémie du coronavirus, des experts allemands seraient déjà venus en Algérie pour discuter sur place des modalités de réalisation de ce projet.
À ce sujet, Saïd Beghoul, expert en énergie, estime le projet est «trop cher et ambitieux» face à la réalité du terrain. Ses ambitieux objectifs reposent sur le fait que chaque kilomètre carré de désert reçoit annuellement une énergie solaire équivalent à 1,5 million de barils de pétrole, selon ses initiateurs et qu’un carré de 254 kilomètres de côtés, au désert, suffirait pour répondre à la demande mondiale d’électricité».
Ce n’est pas gagné d’avance. Il reste à savoir «à qui profitera le plus ce projet ? Comment il sera mis en œuvre ? Comment répartir les quotas des coûts du projet, d’au moins 400 Mds d’euros ? D’où viendrait l’eau qui servirait au refroidissement des centrales solaires au Sahara ?» Dans cette optique, M. Beghoul insiste également sur l’éventualité du caractère hybride des centrales solaires. En plus, face aux efforts considérables européens dans la production locale d’énergie renouvelable, il se demande si l’objectif initial de Desertec-Dii d’exporter de l’énergie vers le vieux continent serait concurrentiel ?
Dans son analyse, l’expert indique que «ce projet budgétivore perd de plus en plus d’envergure et du terrain depuis le retrait de l’actionnaire fondateur, Siemens, en novembre 2012 et à la tension entre la Fondation Desertec et Desertec Industrial Initiative (Dii), qui a conduit à leur divorce en juillet 2013. Quant à Nassima Ouhab-Alathamneh, docteure en géoéconomie de l’énergie, elle indiquait que Desertec dont l’objectif est d’exploiter l’énergie solaire dans le désert est l’un des projets prometteurs permettant la couverture d’au moins 20% de la demande européenne en électricité, en plus des besoins nationaux. Rappelons, par ailleurs, que le ministre de l’Energie, Mohamed Arkab, a précisé que le projet «Desertec» n’est qu’un projet parmi tant d’autres dans les énergies renouvelables, auxquels s’intéresse l’Algérie, et expliquait que la stratégie de l’Algérie pour les énergies renouvelables passe par trois étapes.
La première est à court terme, elle vise à activer tout ce qui concerne l’économie de l’énergie et l’utilisation des énergies alternatives puis une étape à moyen terme liée aux transformations industrielles par le raffinage du pétrole et enfin une étape de diversification économique à long terme.
El Moudjahid