Un défi personnel mais surtout un challenge pour l’environnement. Faïza Azzouz a adopté le déplacement en vélo. Son engagement est plutôt quotidien et pas occasionnel. L’environnement a besoin de petits gestes durables.
Portrait d’une femme qui s’est battue pour réaliser son rêve et invite aujourd’hui les autres à «goûter» à cette liberté hors norme.
Ce n’est que cette année qu’elle a enfin pu réaliser le rêve de son père de 1994, celui d’aller à l’université ou au travail à vélo. Aujourd’hui, Faïza Azzouz, à 46 ans, sillonne les rues d’Alger avec son vélo.
Elle est admirée, félicitée mais surtout un désir d’être suivie. Un exemple. Premier objectif : la protection de l’environnement. Moins polluant, on le sait tous, le vélo contribue à réduire les gaz à effet de serre et les polluants atmosphériques. Une manière pour elle de réduire les encombrements interminables de la ville. Un geste simple, certes, mais il faut d’abord oser, dit-elle. Faïza n’est pas forcément Amanda Ngabirano de son époque.
Cette urbaniste ougandaise surnommée Madame vélo. Mais elles partagent un point commun : le vélo fait avancer les femmes mais aussi l’environnement.
Un acte courageux et militant. «Il est simplement moins polluant et moins encombrant», dit Faiza Azzouz, diabétique depuis 37 longues années. Son histoire avec le vélo a commencé depuis son enfance puis adopté en adolescente, mais sans courage de le pratiquer à l’âge adulte. Encouragée par son père, Faiza, est consciente dès son jeune âge des «tabous culturels». Mais, elle est aussi plus convaincue que le vélo est un outil d’émancipation.
Même si elle était déjà persuadée par la cause écologique, à 20 ans, il fallait d’abord se battre pour tenir le guidon et se balader dans le petit quartier de Tlemcen où sa famille s’est installée pour quelques années. Elle s’adaptait peu à cette ville natale de son père, mais elle combattait les idées que le vélo se conjugue toujours au masculin. «Adolescente et jeune, j’avais compris que le vélo était interdit aux filles. Mais j’avais l’appui de mon père».
C’est à cette époque que son père l’encourage à décrocher son bac et d’ aller à l’université en pédalant. Le bac n’était finalement arraché qu’après cinq tentatives. En 1997, elle décroche son accès à l’université sans pour autant prendre son vélo. Ce n’est qu’en 2007 qu’elle retourne à Alger, pour y travailler à la radio. Aujourd’hui, Elle est réalisatrice à la radio nationale, pour la chaîne 3.
D’abord en guise d’hommage : «D’ailleurs, le VTT a été payé par l’argent de l’héritage de mon père. C’est une façon de lui rendre hommage et de réaliser son rêve». Puis, à l’arrivée du confinement, les routes étaient moins encombrées et «moins stressantes et dangereuses». «J’ai crié victoire en 2020. J’espère que les autres filles me suivront».
Sécurité
Depuis mars dernier en profitant de la période du confinement, Faiza prenait son vélo, faisait des tours, des courses… Peu à peu, elle va sur son vélo à la radio, à El Mouradia, elle qui habite le centre- ville d’Alger. Son arrivée au parking est conçue comme «un événement». «Faiza est arrivée… criaient les agents de sécurité», raconte-t-elle encore en toute fierté. Les premiers temps, c’est sous leurs applaudissements qu’elle stationnait. Sans complexe elle raconte qu’elle est parfois aidée par ses amis.
Pas toujours évident de changer une roue ou une chaîne, de réparer le claxon…. Le paradoxe est que son environnement est conscient, convaincue de sa démarche écolo, mais rares sont ceux qui prennent l’initiative. Ils avancent plusieurs arguments qui font que les conditions ne s’y prêtent pas encore. Manque d’espace pour aménager des bandes cyclables, absence d’espace pour le stationnement…
Aujourd’hui, Faïza Azzouz est convaincue et elle appelle même les autorités à plus d’efforts pour offrir plus d’avantages aux cyclistes. C’est un changement général qui doit s’opérer, que ce soit grâce à la création de pistes cyclables, de panneaux de signalisation plus explicites, de parkings plus sûrs. L’objectif est en fait de faire du vélo un moyen de déplacement pratique et agréable, en toute sécurité. Mais les addicts y croient encore.
Des groupes de femmes se forment pour passer des heures à s’entraîner, à apprendre les techniques du vélo à la promenade des Sablettes à Alger. «Je suis disposée à apporter mon aide, car qui ne tente rien n’a rien», assure Faïza qui ambitionne de faire aussi du tourisme à vélo, surtout qu’au fil du temps, la peur se dissipe. «Je savoure mieux aujourd’hui, mais pour cette ambition, il me faut un accompagnateur.»