Le traitement des déchets issus de la prise en charge des patients infectés ou suspectés d’être infectés par le COVID-19 se fait à travers l’incinération à une température de 850°C ou par prétraitement par désinfection à une température supérieure ou égale à 100°C. Ces deux technologies sont bel et bien pratiquées en Algérie. Toutes les structures sanitaires sont supposées gérer ce type de déchet de la sorte.
-Les déchets hospitaliers représentent un danger aussi bien pour la santé publique que pour l’environnement. Le traitement de ces déchets posait déjà problème en temps normal. Qu’en est-il de leur traitement en ces temps de la propagation du virus Covid-19?
La dangerosité des déchets n’est plus à prouver. Les déchets d’activité de soins (DAS) le sont à plus d’un titre au regard de leur composition à très haut risque pour la santé humaine et l’environnement. A cela, il faudrait rajouter une production de plus en plus importante avec parfois un outil de traitement qui fait défaut. Nous nous situons dans un contexte bien particulier caractérisé par une activité sanitaire exceptionnelle due à la propagation du virus Covid-19. Et un contexte exceptionnel entraîne fatalement une production de déchets exceptionnels qu’il va falloir prendre en charge.
Face à cette situation, il faudra considérer les quantités générées, les différentes sources de production et l’émergence de nouveaux types de déchets. Néanmoins, la conduite de telles stratégies de prise en charge ne se résume pas uniquement au traitement ; on parle plutôt de la gestion des déchets d’activité de soins. Les DAS sont gérées conformément au décret exécutif n° 03-478 du 09 décembre 2003. Ce texte classe ce type de déchets en trois catégories : déchets anatomiques, déchets infectieux et déchets toxiques. La gestion idoine consistera donc à séparer les DAS dans le cadre de ces trois catégories et de les orienter séparément vers des outils de traitement spécifiques à chaque type de déchet.
Les déchets produits durant cette phase de pandémie relèvent surtout de la catégorie des déchets infectieux. Il est formellement interdit de procéder au dépôt, à l’enfouissement ou à l’immersion des DAS dans des lieux autres que les et installations qui leur sont réservées. Le traitement des déchets issus de la prise en charge des patients infectés ou suspectés d’être infectés par le Covid-19 se fait à travers l’incinération à une température de 850°C ou par prétraitement, par désinfection à une température supérieure ou égale à 100°C. Ces deux technologies sont bel et bien pratiquées en Algérie. Toutes les structures sanitaires sont supposées gérer ce type de déchetz.
-Y a-t-il un dispositif spécial pour la gestion de ces déchets durant cette période de pandémie ? Et concerne-t-il tous les hôpitaux d’Algérie ou bien uniquement ceux des régions touchées par le Covid- 19 ?
En fait, on ne devrait pas parler d’un dispositif spécial si ce n’est de prévoir une capacité de stockage et de transport additionnelle au regard de l’augmentation en volume des déchets produits. Dans le cadre de la gestion des DAS, toutes les activités sanitaires doivent considérer les flux suivants : les déchets mous comme les bavettes, gants, combinaison à usage unique ; pansement, coton, lingettes… et qui doivent impérativement être pré-collectés dans des sachets plastiques d’une épaisseur minimale de 0,1 mm, à usage unique, de couleur jaune, résistants et solides et ne dégageant pas de chlore lors de l’incinération. Il est recommandé dans le cas de cette épidémie et pour plus d’efficacité de doubler le sachet ou de le mettre dans un carton dédié à cet usage.
Il faut s’assurer de la fermeture des sacs avant l’enlèvement. Les déchets infectieux coupants, piquants ou tranchants à mettre dans des récipients rigides et résistants à la perforation, munis d’un système de fermeture, ne dégageant pas de chlore lors de l’incinération et contenant un produit désinfectant adéquat. Les mesures opérationnelles suivantes doivent être considérées :
Les déchets d’activité de soins ne doivent en aucun cas être déposés en dehors des locaux de regroupement. Ces mêmes locaux doivent être nettoyés et désinfectés après chaque enlèvement. Les conteneurs ayant servi à la collecte et au transport des DASRI sont obligatoirement soumis au nettoyage et à la décontamination après chaque utilisation. Le personnel chargé de la pré-collecte, de la collecte, du transport et du traitement, doit être muni de moyens de protection individuelle, résistants aux piqûres et coupures. Il doit être informé des risques encourus lors de la manipulation des déchets et formé aux bonnes pratiques de manipulation de ceux-ci.
Dans tous les cas de figure, le personnel en charge de la thématique de la gestion des déchets d’activité de soins devrait se référer aux directives nationales relatives à l’hygiène de l’environnement des établissements de santé publics et privés (MSPRH 2015) et le guide national sur la gestion des déchets d’activités de soins élaboré conjointement en 2019 entre l’Agence nationale des déchets (MEER) et la direction générale de la prévention et de la promotion de la Santé (MSPRH).
-Comment se fait concrètement la collecte des déchets hospitaliers en ce temps de pandémie ?
Une collecte différenciée est opérée à même les structures sanitaires. Les DAS sont stockés au niveau des points de regroupement puis acheminés vers le lieu de traitement indiqué à cet effet. Le traitement peut se faire à même la structure sanitaire si cette dernière dispose d’un outil de traitement ou dans des installations externes agréées par le ministère de l’Environnement et des Énergies renouvelables. Les transporteurs doivent impérativement disposer d’un agrément délivré par le ministère de l’Environnement et des Energies renouvelables. En phase de pandémie, les durées de stockage sont réduites et la fréquence d’évacuation est intensifiée pour éviter la propagation du virus.
-Une partie de ces déchets sont potentiellement infectieux. Ces derniers subissent-ils un traitement sur place avant de les transférer dans des décharges ou dans des centres d’enfouissements ?
Toute procédure de traitement est précédée par un conditionnement spécifique comme mentionné plus haut et il est strictement interdit d’évacuer ces déchets vers des structures de traitement par enfouissement.
-Quel est l’organisme qui s’occupe actuellement de traitement de ces déchets hospitaliers ?
Le traitement des déchets d’activité de soins est assuré par des entreprises agréées par le ministère de l’Environnement et des Énergies renouvelables. Actuellement, nous comptabilisons 13 entreprises activant sur le territoire national avec une capacité installée annuelle de l’ordre de 46 000 tonnes.
-Les déchets liés au matériel à usage unique (gants, masques…) se sont multipliés depuis l’introduction du virus corona en Algérie. Avez-vous évalué les quantités de déchet de ce type produits jusque-là ? Du moins pour le milieu hospitalier ?
Permettez-moi de rebondir sur un aspect très sensible et qui impacte toutes nos stratégies en matière de gestion des déchets. C’est la production d’indicateurs. L’Agence nationale des déchets, conformément aux orientations du ministère de l’Environnement et des Energies renouvelables a développé un système nationale d’information sur les déchets qu’on est en train de déployer à travers les différents secteurs. Une fois fait, nous serons en mesure de mettre à la disposition des différents acteurs des chiffres consolidés. Quant à votre question, une enquête menée auprès d’une installation de traitement agrée a fait ressortir que durant le mois de mars, la quantité réceptionnée a augmenté d’une tonne par rapport aux mois précédents et l’activité de collecte est devenue quotidienne, alors que dans la normale, elle se fait une fois à deux fois par semaine. Nous allons avoir plus de visibilité quant à l’impact du Covid-19 sur la production de DAS une fois toute la donnée récupérée auprès des différentes installations.
-La crainte de la contamination par le Covid-19 a donné lieu à l’utilisation massive des gants et des bavettes par les citoyens. Certains militants écologistes ont déploré le jet de ces bavettes dans la nature notamment dans le milieu marin. Les agents de l’AND ont-ils déjà constaté ce phénomène sur le terrain. Ce phénomène est-il d’une grande ampleur ? Quelles sont les régions concernées ?
C’est un constat fait par tout le monde. Qui de nous n’est pas en train d’utiliser des gants ou des bavettes pour se prémunir du Covid-19 ? C’est un nouveau flux de déchets que le citoyen algérien est en train de générer. Et c’est à ce niveau qu’on pourra dire qu’on a besoin de produire une gestion spécifique. La commune devrait s’organiser en conséquence pour répondre à ce besoin particulier. La gestion des déchets ménagers se fait à travers le schéma directeur de gestion des déchets ménagers. Ce dernier devrait être revu, pour qu’au futur, il puisse permettre aux communes de prévoir ce genre de situations.
Néanmoins, et par mesure préventive, l’Agence nationale des déchets recommande aux citoyens de bien fermer les sacs poubelles et de les déposer aux endroits indiqués.
En temps normal, les DAS sont bien présents dans le milieu marin. Ils sont de l’ordre de 1% de la masse de déchets quantifiée par les cadres de l’AND durant les deux exercices précédents. Ce sont des flux qui ont dû échapper au circuit de collecte mais qui ne proviennent pas forcement des installations sanitaires. Les 700 décharges recensées à travers les wilayas côtières pourraient y contribuer aussi.
El Watan