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Directeur Général du Cluster énergie Solaire «Travailler le volet des tarifs de l’énergie»

-49 ans après la nationalisation des hydrocarbures, l’on continue à compter sur les ressources conventionnelles. A votre avis, pourquoi l’Algérie n’arrive toujours pas à sortir de cette dépendance vis-à-vis du pétrole et du gaz ?

Il faut d’abord rappeler que la nationalisation des hydrocarbures a permis au pays de sortir du sous-développement et de disposer de revenus importants qui ont permis à des pans entiers de la société de bénéficier de ses avantages, y compris celui d’accéder à une énergie abondante et pas chère. Si cela avait été jugé nécessaire de maintenir des bas prix de l’énergie durant de nombreuses années, aujourd’hui il semble nécessaire de revoir notre modèle de consommation énergétique à travers des mécanismes destinées à favoriser le recours aux énergies renouvelables combinées à l’efficacité énergétique dans tous les secteurs, dont notamment le secteur résidentiel et le secteur des transports.

-Qu’est-ce que vous proposez comme mécanismes dans ce cadre ? 

En ce qui concerne les énergies renouvelables, c’est de recourir aux panneaux solaires. Un exemple : le ministère de l’Intérieur a un programme ambitieux d’électrification des écoles. Ce programme concerne environ 500 écoles dans tout le pays. Actuellement, un système solaire sans batteries alimente l’école durant la journée et il peut arriver qu’un excès d’énergie subsiste et par absence d’une règlementation adéquate, cet excès est perdu et n’est pas injecté dans le réseau de distribution électrique.

Durant l’été, la totalité de cette énergie est inexploitée alors que durant cette période la demande en énergie atteint des pics. Si une réglementation est mise en place, l’excès d’énergie est envoyé dans le réseau vers des consommateurs proches du centre de production. C’est la décentralisation de la production d’énergie et une compensation entre le producteur (ici l’APC qui gère les écoles) et la société de distribution peut être imaginée. De plus, en imaginant que cela soit appliqué aux 19 000 écoles existantes, on pourrait installer 150 MWc de panneaux photovoltaïques. Cela va aussi faire travailler l’industrie locale et créer beaucoup de postes d’emploi.

Concernant l’efficacité énergétique, il faut que la délivrance du permis de construire soit conditionnée par une étude relative aux économies d’énergie obtenues en utilisant les matériaux adéquats. Une première étape serait d’imposer cela aux études élaborées par les bureaux d’études qui seront obligés de recruter des ingénieurs en énergie thermique par exemple. Elle pourrait être appliquée au programme de 1 000 000 de logements. Tout cela devrait être accompagné par de la formation à tous les niveaux.

– Quelle place dans le plan d’action du gouvernement pour développer les énergies renouvelables ?

Dans le plan d’action du gouvernement, les énergies renouvelables sont considérées comme un des leviers pour assurer la transition énergétique du pays. Les objectifs restent ambitieux, mais nous restons attentifs aux précisions que les autorités doivent fournir pour assurer un déploiement effectif pour les périodes considérées, à savoir un premier palier de 4500 MW en 2024 et 16 000 MW en 2030/2035.

Nous disons cela, car depuis 2011 on assiste aux mêmes engagements non concrétisés avec une réalité qui est là pour nous rappeler qu’uniquement 390 MW ont été installés en 9 ans alors qu’on nous avait annoncé 22 000 MW en 2011. Durant la même période, le recours au gaz naturel pour produire de l’électricité s’est accru d’une puissance supplémentaire de 8000 MW qui ont été installés à partir de centrales électriques sur la base de cycles combinés. On voit bien le fossé qui se creuse d’année en année entre les deux modes de production d’énergie électrique.

-Dans ces conditions, est-il possible de rattraper le retard ?

De notre point de vue, il est plus urgent de lancer le déploiement des énergies renouvelables et d’aller crescendo, permettant ainsi aux différentes parties prenantes de mettre en place les réponses adéquates sur les plans réglementaire, technique, industriel, financier, développer les ressources humaines, etc. nécessaires afin de créer de la valeur ajoutée locale et d’impulser l’emploi dans ce secteur. De même qu’il faut travailler le volet des tarifs de l’énergie pour rendre soutenable la transition énergétique, un élément de la sécurité nationale sans laquelle la place de l’Algérie comme puissance régionale risque d’en être dépossédée.

-Qu’attendez-vous justement sur les plans réglementaire, technique, industriel et financier ?

Sur le plan réglementaire, il faut ouvrir la voie à l’autoconsommation pour les écoles, les industriels, les agriculteurs. Cela va rapprocher le site de production du site de consommation et mettre en place un mécanisme pour rendre l’investissement rentable. Pour les grands projets, créer un fonds d’infrastructures pour financer l’investissement à des taux attractifs et pour des périodes allant de 12 à 15 ans. Cela aura pour effet de réduire le tarif proposé et de l’amener petit à petit au niveau de celui du réseau.

Accroître la visibilité va aider l’ensemble des parties prenantes. Enfin, explorer les possibilités de travailler avec les crédits carbone pour rentabiliser les investissements et recourir au financement international comme appoint au financement local.

El Watan

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