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Sarah Talbi. Étudiante et directrice générale de la start-up Genew-in : Nous remplacerons la vaisselle en plastique par une autre biodégradable et comestible

Avec le projet en cours pour l’obtention d’un brevet, on pourrait s’imaginer un jour laisser de côté toute la vaisselle en plastique ou en carton jetable pour qu’elle soit replacée par des pièces produites par des restes de céréales revalorisés. Elle sera biodégradable, sans aucun impact néfaste sur la nature ni la santé.

-Parlez-nous de votre projet de créer des pièces de vaisselles biodégradables et aussi comestibles…

Notre principal objectif était de trouver une solution pour réduire la pollution environnementale causée par l’utilisation des vaisselles jetables en plastique, en aluminium ou encore en papier et en carton, qui sont en grande partie responsables de la déforestation. Notre projet s’accentue sur la valorisation de son de céréales pour en exploiter les propriétés et en faire toute une gamme de pièces de vaisselles biodégradables.

Il s’agit, par exemple, d’assiettes, de gobelets, cuillères, fourchettes… Et tout cela est comestible ! Il consiste à œuvrer à la réduction de l’utilisation du plastique en proposant une alternative écologique basée sur la revalorisation de produits secondaires issus de l’industrie agroalimentaire. Nous offrons en effet une alternative aux consommateurs pour en finir avec l’utilisation du plastique, néfaste pour la santé et l’environnement.

Ce projet s’articule autour d’un produit spécial : Bran-Eco qui est une gamme de pièces de vaisselle entièrement jetables et naturelles. En plus, les produits ne contiennent aucun additif chimique. Ils conviennent à un usage quotidien et à tous les aliments chauds ou froids, liquides ou solides. Après avoir terminé le plat, on peut également manger l’assiette ou la pièce ! Une fois que l’emballage est ouvert, la pièce en question a une durée de vie limitée pour la consommation. Parce que Bran-Eco est un produit non seulement biodégradable et compostable en quelques semaines mais il est également comestible ! Nous avons bien analysé l’idée économiquement et environnementalement. On s’est dit que cela pouvait marcher.

-Toutefois, vous êtes conscients qu’il faut aussi changer les mentalités des consommateurs…

Oui, d’ailleurs nous avons effectué un sondage auprès des consommateurs en leur posant la question de savoir s’ils sont prêts à changer leurs habitudes. Nous avons été surpris par un bon feedbak. Les Algériens sont finalement sensibles à la question de l’environnement. Ils étaient tous inquiets par l’impact des pièces et de vaisselles en plastique. L’aspect comestible a également été posé. C’est vrai qu’au départ ls étaient sceptiques. Ce n’est pas tout le monde qui était prêt à manger son assiette. Nous avons eu seulement 70% de oui pour cette question. Le but est essentiellement d’apporter des changements ayant un impact sociétal et environnemental positif. Le plastique à usage unique sera interdit en 2020 en France par exemple ; en Algérie, ce n’est pas toujours évident, même si nous espérons le contraire. Avec notre alternative, le consommateur pourra faire son choix et adopter le changement. Nous essayons de sensibiliser le consommateur. Notre action s’inscrit aussi dans le cadre de la lutte contre de réchauffement climatique. Le processus de fabrication de nos pièces de vaisselle jetables possède une faible consommation énergétique et une faible empreinte carbone, contrairement à ceux dérivés du pétrole.

-Comment comptez-vous procéder pour avoir de la matière première ?

C’est un produit industriel secondaire, le son de céréale. Nous avons eu le module des aliments pour comprendre tout cela. Ces produits secondaires sont rejetés par l’industrie. C’est-à-dire la couche externe qui recouvre les grains de céréales et elle est éliminée par les industriels durant le processus de mouture et est destinée à l’alimentation du bétail. Ce produit a des valeurs nutritionnelles riches et nous œuvrons pour sa revalorisation pour l’alimentation humaine. Il est très riche en minéraux et en fibres. Pour notre prototype, nous n’avons pas eu de difficulté, car une moitié nous a été faite comme don. En plus, c’est un produit facilement accessible.

-Et c’est votre start-up créée en mars dernier qui a fait ce projet…

Genew-in est une start-up créée par de jeunes étudiants de l’Ecole supérieure des sciences de l’aliment et des industries agroalimentaires (ESSAIA) située à Alger. Notre équipe se regroupe autour de valeurs telles que la passion, l’ambition, l’éthique, la performance, l’esprit d’équipe, tout en conservant leur devise d’éco-responsabilité. Notre premier but est de concilier entre la nature et le bien-être de la société. A noter aussi qu’il s’agit d’un programme initié par GEN (Global Entrepreneurship Network Algeria) et soutenu par le Middle East Partnership Initiative – MEPI (USA). Il s’agit d’un programme de formation et d’accélération qui reprend l’approche concrète et efficace pour créer un modèle de start-up scalable à ambition mondiale. ELIPCAMP est un accompagnement, un coaching personnalisé et une accélération de start-up.

Ce projet est rendu possible par la générosité et le soutien de l’association réseau entrepreneurial Global-REG et par le biais de l’initiative de partenariat entre les Etats-Unis et le Moyen-Orient (MEPI) dans le cadre du projet ELIP (Entrepreuneurship, leadership & innovation program). Il convient aussi de citer notre école, l’ESSAIA, qui nous a soutenus depuis le début du projet et nous a fourni l’accès au laboratoire pour développer nos premiers prototypes. Nous avons ainsi participé à des expositions comme au SIPSA, à la Journée mondiale de l’alimentation, et au Salon de l’artisanat où nous sommes les lauréats du prix du «Meilleur produit 2019», compétition «company program” (Injaz El Djazair , by junior achievements) et aussi sélection pour le concours «Sipsa Innov Award» en octobre dernier. Nous sommes aussi les lauréats du 1er prix «Business ready» program «techboost challenge» BRENCO feat «incube me», the emerging valley en France et décroché le 1er prix ELIP program connect (Entrepreneurship, Leadership & Innovation program) GEN Algeria, MEPI au USA.

-Quel marché comptez-vous cibler ?

Nous ne visons pas à remplacer la vaisselle permanente, comme celle de céramique ou poterie. C’est donc surtout l’événementiel, comme les mariages, les anniversaires, la vaisselle pour les pique-niques et également les écoles et les crèches. Nous savons tous que les enfants sont très sensibles aux substances chimiques. C’est notre première cible pour le moment. Le but est de remplacer la vaisselle en plastique qui met entre 500 et 1000 ans pour disparaître dans la nature, alors que notre matériel choisi met à peine un mois puisque c’est un matériel naturel qui agit en tant que fertilisant pour le sol. Et comme c’est comestible aussi, cela doit répondre à d’autres conditions sanitaires et réglementations plus strictes. Nous n’allons surtout pas industrialiser de produits douteux. Nous cherchons des investisseurs dans ce sens.

Nous avons eu des propositions, mais nous sommes encore au stade de notre étude financière. Le but est de passer à l’échelle industrielle. Et si on passe à cette échelle, nous pourrons facilement concurrencer la vaisselle en plastique. Pour le coût de revient, les assiettes par exemple coûteront moins de 10 DA. Mais ce qui est certain, cela ne dépassera pas les coîts des assiettes en plastique, alors que nous vendons d’autres valeurs, sanitaires et environnementales. Le consommateur doit être prêt à intégrer ce surcoût par rapport aux valeurs vendues, puisque la matière première est riche en vitamine B, magnésium, calcium et d’autres fibres. On peut aussi réchauffer sans transfert de substances chimiques dans l’aliment.

-Vous êtes en pleine étude pour déposer votre demande de brevet…

Nous faisons des recherches pour déposer un brevet afin de protéger l’idée avant de la commercialiser. Nous travaillons avec le MEPI sur ça.

-Pour le moment, quelle aide attendez-vous de l’Etat ?

La loi de finances 2020 prévoit une exonération des différents impôts et taxes pour la start-up.  Il s’agit en principe d’un précurseur pour une série de réformes concrètes sur l’octroi d’avantages fiscaux et autres facilitations.  Mais j’estime que nous sommes encore à un stade trop précoce pour pouvoir se prononcer sur l’efficacité de ces mesures.

-Avez-vous d’autres projets ?

Nous allons évidemment élargir la gamme et nous resterons dans l’éco-responsabilité. Nous gardons nos valeurs. Le but est de contribuer au développement durable.

El Watan

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