Le silence à l’intérieur de l’UDES (Unité de développement des équipements solaires) de Bou Ismail (Tipasa), illustre parfaitement l’ambiance de travail qui règne dans les ateliers de recherches. Les scientifiques, aux timides regards, sont occupés devant leurs prototypes, made in Algeria, conçus pour la lutte contre le coronavirus.
Un flacon hydroalccolique fabriqué dans l’un des ateliers de l’UDES, selon la formule de l’OMS, est mis à la disposition des employés de ce centre de recherches, malheureusement hors de l’intérêt des décideurs. Moult rencontres scientifiques nationales et internationales avaient été organisées à l’UDES.
Elles avaient abouti à des conclusions intéressantes, mais celles-ci ne semblaient pas attirer les hautes autorités de l’Etat. L’importation des équipements, peu importe la qualité, étaient prioritaires par rapport aux réalisations de nos chercheurs, en mesure de mettre en place les applications capables d’exploiter au moindre coût les énergies propres. Les prix décernés à l’échelle internationale aux scientifiques de l’UDES n’est pas le fait du hasard.
Le CDER (Centre de développement des énergies renouvelables) encourage les initiatives de l’UDES. Le Dr Tassalit Djillali, chercheur et directeur de l’UDES a répondu à nos questions.
Entretien réalisé par M’hamed Houaoura
-Nous savons que l’UDES de Bou Ismail a réalisé des performances. En cette période de crise sanitaire, est-ce que les travaux de l’UDES participent aux efforts dans la lutte contre le Covid-19 ?
Nous prenons à chaque fois nos dispositions pour nous adapter aux besoins économiques de notre pays. Le CDER incite et encourage nos chercheurs à travailler pour arriver à exploiter les énergies renouvelables. L’UDES cherche des solutions que nous pouvons les appliquer immédiatement. Notre centre ne travaille pas seulement pour la technologie de production de l’énergie solaire. Il existe des voies qui nous permettent d’utiliser les énergies propres d’une manière directe ou indirecte. Je vous cite le cas du traitement des eaux par application des énergies renouvelables.
Il y a d’autres équipes de chercheurs qui travaillent sur le froid solaire. Nous possédons des prototypes qui produisent l’air frais dans les serres agricoles. Le CDER avait organisé, à l’UDES, des séminaires sur les applications relatives aux énergies solaires au profit du secteur de l’agriculture, en matière de climatisation et d’humidification, destiné pour les serres agricoles et les serres d’élevage. Nous avons des chercheurs qui travaillent sur le concept Smart home, la maison intelligente, qui fonctionne à l’énergie solaire. Le prototype existe.
-Mais que font les chercheurs de l’UDES pour contribuer à la lutte contre le Covid-19 ?
Nous avons été sollicités par les institutions de notre pays, durant les derniers mois, afin de préparer le programme inhérent à l’efficacité énergétique. Nos chercheurs avaient intégré beaucoup de groupes de travail dans les commissions de recherches et de développement de plusieurs ministères. L’UDES est pourvue d’une excellente expérience dans le domaine de la désinfection de l’eau par l’énergie solaire et l’énergie UV (ultraviolet). Nous avons répondu aux sollicitations pour aller au front. Nos chercheurs s’attèlent à travailler dans ce sens, pour arriver à fabriquer des prototypes de désinfection et de stérilisation. Grâce aux matériaux disponibles sur le marché national, nos chercheurs ont pu produire rapidement des solutions. La lutte contre le Covid 19 exige une réaction rapide des scientifiques et faire face à cette situation d’urgence.
-Pouvez-vous être plus explicite sur les résultats obtenus par vos chercheurs ?
Grâce à leurs expériences, nos chercheurs viennent de mettre au point des applications à système UV pour la désinfection des eaux, la stérilisation des matériels médicaux. Nous avons réalisé trois projets à cet effet. Le 1er projet est une chambre de stérilisation par l’utilisation de l’énergie UV C utilisée pour stériliser les bavettes, entres autres. Le 2e projet concerne la désinfection des salles par l’utilisation, toujours, de l’énergie UV C.
L’équipement sera dirigée par une tablette ou une télécommande. Bien entendu, avec système de protection, compte tenu de la dangerosité de l’ultraviolet C sur la peau et les yeux. Le 3e projet est un chariot mobile de désinfection du sol et des murs. Il fonctionne suivant l’intensité des lampes UV. Nous avons actuellement une équipe qui s’est lancée dans la conception d’un respirateur artificiel simple, car cette machine est complexe. Les chercheurs font très attention, car il s’agit d’une intervention sur une vie humaine et ce n’est pas simple. Ce système existe depuis plus d’un siècle ailleurs.
Nous ne sommes qu’au début de nos recherches. Nos chercheurs comptent créer un système avec des sons, des capteurs, mais il faut être patient. Néanmoins, nous sommes dans un stade avancé dans la conception des trois prototypes. Notre direction générale de la recherche au ministère de l’Enseignement supérieur est en contact avec le ministère de l’Industrie pour concrétiser les trois projets.
Des solutions sont trouvées pour la production à l’échelle industrielle des prototypes qui ne coûteront pas chers. Nos prototypes peuvent être utilisés durant la crise sanitaire et même après, puisqu’il s’agit de la désinfection et de la stérilisation. Nous avons les capacités de développer nos technologies. Nos chercheurs consultent les résultats des recherches des scientifiques de plusieurs pays, la Chine, l’Angleterre, les USA et autres. C’est une course contre la montre. Nous disposons des prototypes qui sont soumis à l’autorisation du ministère de la Santé, pour ce qui concerne la désinfection des infrastructures qui relèvent de ce secteur.
Le temps de la désinfection dépend de la puissance des lampes UV. Selon la nuisance du virus, il faut utiliser les lampes UV d’une puissance moyenne de 67 joules. C’est un exemple que je vous cite. Nous possédons des applications qui répondent aux besoins actuels dans la lutte contre le Covid-19. Nos systèmes sont certes simples, mais efficaces et moins coûteux. L’UDES est en mesure d’intégrer les diverses applications dans le domaine de désinfection et de stérilisation à travers l’utilisation des rayons ultraviolets et des énergies propres. Notre centre n’a pas les moyens pour réaliser le prototype dans les plus petits détails, je parle du design et autres accessoires.
-Un message à transmettre ?
Nous souhaitons que, cette fois-ci, les chercheurs de l’UDES soient mieux pris en considération, notamment avec la qualité de leurs recherches, bien que leurs conditions de vie ne soient pas au mieux. Pas de logements à titre d’exemple. Les prototypes que viennent de réaliser les scientifiques de l’UDES permettent à notre pays de créer des richesses et d’économiser les devises. Il s’agit des équipements prêts à l’emploi.
Dzair Daily