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Énergies renouvelables : Chitour face au difficile challenge de la transition énergétique

L’Algérie est sans doute l’un des pays les mieux lotis au monde en matière d’énergies renouvelables qui se déclinent sous formes d’énergie solaire, éolienne, géothermique et celle tirée de la biomasse.

Si le soleil avec son potentiel d’irradiation de plus de 5000 Wh/m2 (10 fois la consommation mondiale) est à l’évidence la source la plus généreuse en la matière, les trois autres sources d’énergies renouvelables ne sont pas négligeables et méritent attention. Nouvellement désigné au poste de ministre des énergies renouvelables, le professeur Chemsedine Chitour aura la lourde charge d’impulser une nouvelle dynamique à toutes ces énergies propres et inépuisables qu’offre la nature, pour venir en appoint aux énergies fossiles en phase d’épuisement et entamer le dur chantier de la transition énergétique.

Le challenge est évidemment trop lourd pour un seul homme, quand bien sa compétence et son engagement en faveur de l’écologie sont connus des algériens. Sa réussite dépendra bien évidemment des capitaux disponibles, mais aussi et surtout, des appuis multiformes que le président de la république et le chef du gouvernement lui apporteront pour faire face à toutes les contraintes qu’il ne manquera pas d’avoir, notamment de la part des lobbies pétroliers qui ne souhaiteraient pas que les avantages (rétro commissions, surfacturations, ventes occultes etc.) que leurs offrent le commerce et l’industrie des hydrocarbures disparaissent. L’aide du gouvernement devra concrètement se manifester par l’octroi de financements massifs et de décisions rapides sur les infrastructures qu’il faudra rapidement promouvoir dans les diverses filières des énergies renouvelables en privilégiant, bien entendu, le soleil dont le pays regorge. Compte tenu du déclin des ressources financières de l’Etat, les formules de financements des investissements restent à imaginer par le nouveau ministère chargé de la promotion des énergies renouvelable. Toutes le formules modernes de financement d’infrastructures (B.O.T, emprunts obligataires, appels aux hommes d’affaires algériens, IDE etc.), sont à prendre, sous réserve qu’elles n’hypothèquent les intérêts supérieurs de la nation.

La stagnation de la production d’hydrocarbures couplée à une croissance démesurée de la consommation nationale a en effet suscité une forte réaction du gouvernement qui a décidé de prendre à bras le corps cet épineux problème de réduction des quantités d’hydrocarbures exportables en misant sur les énergies durables. L’opportunité est bonne car il n’est plus rentable d’investir dans l’exploitation de pétrole et de gaz dont les prix se sont effondrés au point où le pari économique n’est plus jouable.

Un premier programme d’énergie renouvelable de 22.000 MW à long terme a ainsi vu le jour dès l’année 2011 avec pour objectif de mettre en place à l’horizon 2030 une capacité de production d’électricité de 12.000 MW essentiellement destinée à la consommation intérieure. Ce potentiel d’énergie comportera 10.575 MW en photovoltaïque, 2000 en  thermo solaire, 2.000 en éolien et le reste entre biomasse, géothermie et cogénération. Il est d’ores et déjà question de lancer un projet de 4000 MW d’un coût prévisionnel de 3,6 milliards de dollars. Annoncé à grand renfort médiatique par l’ex ministre de l’Energie ce projet n’est malheureusement pas à la mesure des faibles moyens financiers disponibles. Il risque de ce fait d’être différé de plusieurs années le temps de trouver des investisseurs étrangers qui accepteraient de partager la facture et les risques.

Un second programme de 10.000 MW destiné à dégager une quantité considérable de gaz naturel aujourd’hui réservé à la production d’électricité, pour les destiner à l’exportation, a également été lancé mais il a, pour diverses raisons, été relégué aux calendes grecques. Très médiatisé lorsqu’il fut annoncé en 2018 sous le règne d’Abdelaziz Bouteflika, on ne trouve aujourd’hui nul commentaire à son sujet.

Ces deux programmes avaient été pourtant accompagnés par la promulgation d’un arsenal juridique favorable à la promotion des énergies renouvelables à travers, non seulement, les incitations destinées à l’investissement dans les filières de l’énergie renouvelable et des diverses formes d’usages qui en seront fait, mais aussi, à la promotion de l’industrie du renouvelable et, notamment, la fabrication locale d’un part significative des équipements de production. Dans le cadre de ces programmes il n’a, malheureusement, été réalisé à ce jour qu’une capacité de production de 354 MW, sur les 10.000 MW programmés. Bien que très timide la production d’énergie solaire et la fabrication locale de panneaux photo voltaïques constituent l’essentiel des résultats modestes. L’Algérie aurait pu faire beaucoup plus et beaucoup mieux, mais c’est tout même un bon début, estiment de nombreux experts qui connaissent l’amère réalité algérienne.

Au ministère de l’Energie on retient 2018 comme année effective du démarrage de cet ambitieux programme avec notamment le lancement des appels d’offres pour la réalisation d’une première tranche de 4050 MW, même s’ils n’ont toujours pas trouvé preneurs. On prévoit de créer dans ce cadre une société par actions en mesure de financer, construire et exploiter un certain nombre de centrales photovoltaïques de 1030 MW chacune. Il est également question de constituer une société industrielle dont l’objectif est de réaliser et exploiter plusieurs usines de fabrication d’équipements et composants de centrales photovoltaïques.

Bien que son potentiel soit beaucoup plus modeste que le solaire, l’énergie éolienne retient elle aussi l’attention des pouvoir publics algériens qui ont inscrit bon nombre d’actions à entreprendre pour la développer du mieux possible. Le programme national d’énergies renouvelables prévoit la réalisation d’une capacité éolienne de 5.010 MW, dont 1010 MW à l’horizon 2020, et le reste de 4000 MW à l’horizon 2030. Le programme ayant pris du retards on ne compte aujourd’hui qu’une modeste ferme pilote éolienne de 10 MW réalisée par la Sonelgaz à quelques encablures de la ville d’Adrar.

Pour ce qui est de l’énergie géothermique, le potentiel algérien à exploiter est constitué d’environ 240 sources géothermales performantes (entre 50 et 65°), pratiquement toutes localisées dans la partie nord du pays et un millier d’autres d’importance diverses dans le sud algérien. L’usage de cette énergie à des fins domestiques et agricoles (chauffage de serres), comme cela a déjà été fait à Touggourt, permet déjà de produire une dizaine de MW d’énergie essentiellement destinés à l’agriculture locale.

La biomasse constitue aussi une source privilégiée d’énergie sur laquelle le gouvernement va beaucoup miser. Le potentiel est énorme puisque l’Algérie génère, entre 10 et 12 millions de tonnes de déchets ménagers et agro-industriels qui sont pour l’essentiel rejetés dans des décharges (46%), ou des centres d’enfouissement techniques (36%). Seuls 10% de ces déchets sont recyclés, le reste étant abandonné, alors qu’ils peuvent constituent un potentiel d’énergie non négligeable. Leur valorisation par méthanisation pourrait produire environ 974 millions M3 de biogaz et prés de 1750 GMh d’électricité. Cette biomasse se trouve également dans une centaine d’usines d’épuration d’eaux vannes desquelles sont rejetées environ 250.000 tonnes de boue chaque année. De quoi produire 23 millions M3 par an de biogaz  et 41 GWh d’électricité.

Une étude effectuée à la fin de l’année 2015, évoque également les déchets agro-industriels qui peuvent faire l’objet d’une valorisation énergétique appréciable par incinération ou méthanisation, à l’image des grignons d’olives dont le pouvoir calorifique est important. Ces derniers sont actuellement jetés dans la nature par milliers de tonnes à travers toutes les régions productrices d’huiles d’olives. On évoque déjà la possibilité de tirer environ 215 GWh par an de ces millions de tonnes de grignons qui polluent aujourd’hui la nature faute de valorisation industrielle.

 

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